Azeez Tobi Abubakar est un militant nigérian de 23 ans pour le climat et un membre du Global Citizen Fellowship Program, soutenu par BeyGOOD.
Il revient ici sur son expérience en tant que jeune ayant grandi dans un pays en développement, sur les conséquences directes du changement climatique et sur la façon dont cela a influencé sa décision de devenir un militant de la lutte contre le changement climatique. Il évoque également ses attentes et la réalité de sa première participation à une conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP), après s’être rendu à Glasgow, en Écosse, pour la COP26 de cette année.
La COP26, qui s’est déroulée du 31 octobre au 12 novembre, a placé la lutte contre le changement climatique au centre de l’attention, en tant que problème mondial urgent nécessitant une action immédiate et de grandes ampleurs. Vous pouvez vous joindre à nous et passer à l’action ici pour défendre la planète, en demandant aux dirigeants des gouvernements et des entreprises de réduire les émissions de carbone et de fournir un financement climatique aux nations qui sont en première ligne du changement climatique.
Vous pouvez lire la suite de la série « Mon Histoire » ici.
Je m’appelle Azeez Tobu Abubakar. Je suis un Nigérian de 23 ans, débrouillard et plein de ressources, avec une formation en génie civil. J’aime toutes les formes d’art et écouter de la musique pop, et je crois au pouvoir des jeunes pour changer le monde de manière positive.
Je suis particulièrement motivée pour soutenir les groupes les plus vulnérables aux changements climatiques, notamment dans les pays en développement du continent africain. Pour mon mémoire de fin d’études, j’ai développé une approche de conception durable qui redéfinit la manière dont les bâtiments hospitaliers sont construits au Nigeria afin de garantir leur efficacité énergétique.
Grâce à cela, j’ai été présélectionné pour le prix de l’innovation BIM Africa, j’ai obtenu une bourse de l’école de politique publique Pepperdine Leading Smart Communities et une bourse du US Green Building Council (USGBC) Green Associate Credential pour mon travail de promotion des bâtiments écologiques en Afrique. Je fais également partie du programme Global Citizen Fellowship, soutenu par BeyGOOD.
Le fait de grandir au Nigeria, où les problèmes sociaux sont nombreux, a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. L’expérience de la difficulté de subsister dans une communauté à faibles revenus m’a permis de mieux comprendre les personnes qui vivent dans l’extrême pauvreté aujourd’hui.
Le décès de mon père à un très jeune âge a été l’un des moments les plus difficiles de ma vie. Même si je n’étais qu’un enfant, j’ai ressenti à quel point cela a été douloureux pour ma mère. Ma mère est alors devenue un parent isolé qui a dû s’occuper de trois autres enfants. Ce n’était pas facile pour ma famille, et cela m’a poussé à utiliser mes compétences pour être utile aux autres aussi bien qu’à moi-même. Voilà l’une des raisons pour lesquelles je me réjouis sincèrement de contribuer à sortir les autres de la pauvreté grâce à des dons de matériel et à l’autonomisation.
Depuis mon enfance, j’ai toujours été une personne curieuse et soucieuse de trouver des solutions. Ma mère avait l’habitude de dire qu’elle aimait ma façon d’utiliser les briques Lego pour construire des choses. Je n’étais pas exactement l’élève le plus brillant de la classe, mais je posais beaucoup de questions et je voulais en savoir plus que ce que l’on nous enseignait en classe, et je regardais beaucoup de programmes scientifiques à la télévision quand j’étais adolescent.
Il y a cinq ans, j’étais dans une voiture avec mon frère. La pluie tombait si fort que j’avais l’impression qu’elle allait endommager la voiture. Ce soir-là, nous étions coincés dans la circulation sur un pont dans l’État de Lagos (Third Mainland bridge) lorsque le vent se mit à souffler très fort. La pluie était torrentielle et on aurait dit que l’eau en contre-bas allait monter, inonder le pont et emporter les voitures ainsi que les personnes terrifiées qui s’y trouvaient à l’intérieur.
C’était terrifiant. Je pouvais entendre et sentir la panique de tous ceux qui étaient bloqués sur le pont, incertains du sort qui les attendait. La pluie a continué à tomber pendant trois heures entières. Mon frère et moi étions si terrorisés. Pour dire les choses simplement, c’était une expérience traumatisante que je ne voudrais que personne n’ait à vivre.
J’ai commencé à faire des recherches sur ce qui pouvait avoir causé cela, et j’ai découvert que c’était l’un des premiers effets du changement climatique. Il est également évident que la crise climatique affecte les jeunes mentalement. L’anxiété liée au climat augmente rapidement, en particulier dans les communautés les plus vulnérables où vivent des personnes comme moi.
Azeez Abubakar photograhié à Glasgow, lors de la COP26, le 6 novembre, 2021.
De nombreuses personnes de ma communauté, des personnes vulnérables qui, dans certains cas, peuvent à peine mettre de la nourriture sur la table, et qui ont le moins contribué à provoquer le changement climatique, sont les plus affectées. Ce sont des personnes dont les propriétés sont endommagées, dont les moyens de subsistance sont détruits, en raison non seulement des inondations, mais aussi de la sécheresse et de la désertification.
Pourtant, les gouvernements des pays développés ignorent l’ampleur du problème. Ils ont fait très peu pour aider les pays en développement qui subissent des pertes et des dommages liés au changement climatique. Cette situation n’est pas juste. C’est une injustice climatique. C’est pour cette raison que j’ai commencé à plaider pour un financement adéquat des pertes et dommages causés par le climat. Les pays développés doivent aider les pays en développement à s’adapter et à renforcer leur résilience face à la crise climatique dès maintenant !
J’ai récemment assisté à la COP26, ma première participation à un sommet de la Conférence des Parties, à Glasgow, et je pense honnêtement que nous ne cessons pas de répéter la même chose depuis plus de deux décennies maintenant. Ce qui compte vraiment, c’est les mesures prises par les dirigeants mondiaux après avoir annoncé des engagements..
Je m’attendais à voir des promesses et des engagements plus ambitieux et plus courageux. Je voulais voir davantage d’actions sur les pertes et dommages liés au climat, une question qui, par le passé, n’a pas été considérée comme prioritaire dans les négociations. Je voulais voir un plus grand souci de responsabilité et un état d’esprit collectif. Je voulais voir plus d’actions sur la reconnaissance du droit à un environnement sain pour tous, partout. Je voulais voir davantage de mesures prises pour assurer une transition juste et inclusive vers des émissions nettes nulles qui créent davantage d’emplois verts pour les personnes les plus vulnérables touchées par la crise climatique.
Je connais plusieurs activistes qui mènent des actions climatiques dans des communautés locales de pays en développement en Afrique et qui n’ont pas pu se rendre à la COP26 pour une raison ou une autre. Certains d’entre eux ont eu des problèmes de visa, tandis que d’autres n’ont pas obtenu d’accréditation et/ou de financement pour assister au sommet. Je pense que la COP26 n’était pas assez inclusive. Pour que la COP soit inclusive, les jeunes de tous horizons, et notamment ceux qui sont touchés par la crise climatique, doivent être soutenus pour participer efficacement au sommet.
Je veux que les jeunes aient un pouvoir de négociation lors des Conférences des Nations unies sur le changement climatique. Les décisions prises par les dirigeants mondiaux lors de ces conférences pourraient avoir un impact sur de nombreuses communautés dans mon pays et en Afrique. Il s’agit de notre avenir ! Nous devrons être la génération qui vivra les conséquences du changement climatique si des mesures immédiates ne sont pas prises pour y remédier. Les jeunes, en particulier ceux qui vivent dans des communautés vulnérables comme moi, sont les plus touchés par les effets du changement climatique. Nous comprenons les défis à relever et nous sommes mieux placés pour proposer des solutions durables lors de la prise de décision et de l’élaboration des politiques.
Pour mon continent, l’Afrique, les pertes et dommages coûtent déjà des centaines de milliards de dollars chaque année, et on prévoit que ce chiffre devrait atteindre entre 300 à 600 milliards de dollars par an d’ici 2030 dans les pays du Sud. L’octroi d’un billion de dollars sur cinq ans aiderait les pays du Sud à faire face aux pertes et dommages à hauteur des besoins actuels et futurs.
Les gouvernements des pays riches doivent s’engager à fournir de nouveaux financements publics supplémentaires sous forme de subventions, et non de prêts ou de fonds de développement, car il ne s’agit pas là d’une opération de charité. Ces financements doivent parvenir immédiatement aux pays et aux communautés affectés par les conséquences du changement climatique. Le financement des pertes et dommages doit venir s’ajouter au financement des mesures d’adaptation et d’atténuation déjà en place.
De plus, les industries et les entreprises les plus responsables de la crise climatique doivent payer pour les pertes et les dommages. Dans le cadre d’une transition équitable vers l’abandon des combustibles fossiles, les gouvernements doivent taxer les entreprises de combustibles fossiles sur chaque quantité extraite, et utiliser cet argent pour indemniser les pertes et les dommages subis par les pays les plus vulnérables.
La mise en place d’un mécanisme de financement des pertes et dommages qui comprend le financement des pertes et dommages supplémentaires et nouveaux est un bon point de départ.
Je pense que chacun a un rôle essentiel à jouer dans la lutte contre la crise climatique. Le récent rapport du GIEC a confirmé que certains changements sont irréversibles. Nous devons donc travailler ensemble pour mettre fin à cette crise.
Je crois au pouvoir des partenariats stratégiques et d’une collaboration fructueuse. L’utilisation de l’approche 4P (Partenariat Public-Privé-Populations) constitue une excellente occasion de s’attaquer de manière globale aux problèmes liés au changement climatique.
"Je crois qu'aucune action n'est trop petite pour faire la différence", écrit Azeez Abubakar.
Le gouvernement doit veiller à ce que les gens puissent se remettre rapidement des répercussions du changement climatique en les aidant à mettre en place des mécanismes de résilience et d’adaptation. Les grandes entreprises peuvent être utiles en fournissant des financements sous forme de subventions à des initiatives climatiques menées par des jeunes. Elles peuvent contribuer à créer des emplois verts pour assurer une transition énergétique juste et inclusive pour tous. Les petites entreprises, avec le soutien des grandes entreprises et du gouvernement, peuvent adopter des technologies d’énergie propre telles que les solutions solaires et la biomasse.
Je crois qu’aucune action n’est trop petite pour faire la différence. Par conséquent, les individus ont un rôle important à jouer dans cette lutte. Cela commence par des choix de vie plus respectueux de l’environnement. Les individus doivent repenser leurs modes de vie, par exemple manger moins de viande, utiliser un sac en papier au lieu d’un sac en plastique ou se rendre au travail à vélo le matin au lieu de prendre un taxi. Toutes ces actions pourraient contribuer à réduire considérablement notre empreinte carbone.