Le Gabon vient de dépénaliser l’homosexualité, Le Monde a rapporté cette semaine.
Mercredi 23 juin, à Libreville, les membres du parlement gabonais ont voté en faveur de la révision d’un texte de loi qui criminalisait l’homosexualité qui a été introduit en juillet 2019 pour cause d’« atteinte aux moeurs ». Cette dernière était sanctionnée par une peine pouvant aller jusqu’à six mois d’emprisonnement ainsi qu’une amende de 5 millions de francs CFA (soit environ 9 000 dollars américains).
La révision de cette article, soutenue jusqu’ici par le premier ministre Julien Nkoghe Bekale, a été adoptée par 48 membres du parlement, tandis que 25 d’entre eux se sont abstenus, et 24 ont voté contre.
Le premier ministre gabonais a salué cette initiative sur Twitter, en soulignant être contre « la stigmatisation des homosexuels » en dépit de ses convictions religieuses. Il a également salué les parlementaires pour « avoir fait évoluer les mentalités et su s’adapter au temps ».
J’ai des convictions religieuses. Je suis tolérant et je respecte la vie humaine. De même que je suis contre la peine de mort, je suis également contre la stigmatisation des homosexuels. Bravo aux parlementaires d’avoir fait évoluer les mentalités et su s’adapter au temps.
— Julien Nkoghe Bekale (@Pm_JulienNkoghe) June 24, 2020
Avant de voter cet amendement, le Gabon figurait parmi les 73 pays ou juridictions au monde où l’homosexualité était interdite, selon le New York Times.
Dans plus de la moitié de l’Afrique subsaharienne — 28 pays sur 49 — les relations entre personnes de même sex sont encore largement criminalisées, considérées comme tabou, voire sanctionnées par la peine de mort, selon la International Lesbian, Gay, Bisexual, Trans and Intersex Association.
L’organisation de défense des droits humains Human Rights Watch souligne également que la COVID-19 a exacerbé cette stigmatisation dans certains pays de la région ; la crise a notamment poussé de nombreuses personnes LGBTQ à vivre dans des conditions économiques précaires, mettant leurs vies en péril.
Mais l’initiative gabonaise — bien qu’elle marque un pas en avant en matière de droits LGBTQ — ne fait pas l’unanimité.
Sur les réseaux sociaux et auprès de certaines personnalités politiques du pays, le résultat du vote divise.
« Quarante-huit législateurs ont ébranlé une nation entière et ses coutumes et traditions », a ainsi déclaré un membre du parlement, qui a voté contre la révision, à Reuters.
La communauté LGBTQ craint donc un retour de bâton négatif et une certaine résistance du reste de la population, qui est majoritairement opposée à ce projet, selon Leslie Obuo, une journaliste LGBTQ basée au pays.
« Le simple fait qu'ils aient lancé cette loi a ravivé l’homophobie, et si elle est adoptée, je m'attends à ce qu'elle se heurte à la résistance de la population en général », a notamment affirmé Didier, un homme gay vivant au Gabon, à Reuters.
« Les émeutes et la violence contre la communauté vont probablement culminer et le gouvernement pourrait finalement faire un autre demi-tour », a-t-il poursuivi.
Pour constater ce qu’il en adviendra, il faudra attendre que le projet soit adopté par le Sénat sous les mêmes conditions selon lesquelles il a été voté par l’Assemblée nationale. À ce stade seulement, il pourra être entériné au sein d’une loi.